vendredi 23 février 2018

2017 : Pour un Maroc sans "petites bonnes", modifions la loi 19.12

Loi 19.12 sur « les conditions d’emploi et de travail des travailleur(e)s domestiques »
Processus daté d’une action ratée

Prévue pour organiser le travail domestique, la Loi 19.12 aura servi à faire connaître le calvaire des « petites bonnes » dans notre pays, au détriment des travailleur(e)s domestiques qui auront perdu plus de 10 ans à attendre leur loi, sans que le problème des mineur(e)s soit résolu pour autant. Une occasion législative manquée, dont je fus un des très nombreux témoins.





3 août 2017 : Epilogue inachevé
La Loi 19.12 concernant « Les conditions d’emploi et de travail des travailleur(e)s domestiques »
a été votée le 26 juillet 2016 par le Parlement et publiée au Bulletin Officiel le 22 août 2016.
Après près de 10 ans de tergiversations des gouvernements successifs et de combat soutenu de la société civile, ce texte, qui va certes permettre d’amorcer la régularisation de la situation des dizaines de milliers de travailleur(e)s domestiques qui en ont grand besoin, contient des dispositions iniques pour les mineur(e)s face à l’exploitation indigne dans le travail domestique dans les conditions que chacun sait :
1.    Il prévoit une période dite de transition de 5 ans à partir de la date d’entrée en vigueur, pendant laquelle il est permis d’exploiter les mineur(e)s de 16-17 ans, en totale contradiction avec tous
les motifs qui ont sous-tendu la fixation de l’âge minimal de 18 ans, d’une part, et qui favorise
la « prolifération légalisée » de l’exploitation des mineur(e)s, d’autre part.
2.    Il prévoit l’entrée en vigueur de la Loi, une année après la publication des décrets d’application dans le Bulletin Officiel, ce qui porte la période effective de transition à 6 ans et qui signifie que  l’exploitation des mineur(e)s ne sera interdite qu’en août 2023 !!
3.    Il prévoit la signature par les mineur(e)s de contrat de travail sur la base d’une autorisation écrite, signée et légalisée de leur tuteur(e), ce qui revient à légaliser le commerce indigne des intermédiaires exercé, aujourd’hui, dans la clandestinité. De plus, chacun sait que les moins de 18 ans dont il s’agit ne sont pas habilité(e)s à signer un contrat.
4.    Il confie le contrôle à l’inspection du travail que chacun sait totalement défaillante dans sa mission actuelle par manque de ressources humains et de moyens matériels. Une institution qui, objectivement, ne dispose ni des compétences requises pour s’occuper d’enfants en situation difficile ou délicate, ni des instruments pour intervenir, car le travail domestique se passe à « huis clos » dans des maisons légalement inaccessibles, sans l’avis de la justice.
5.    Il prévoit une procédure de règlement de conflit similaire à celle concernant le travail en milieu ouvert, alors que les mineur(e)s vivent dans le domicile de l’employeur avec toutes les conséquences en termes d’allégeance/dépendance que cela implique.
6.    Il ne comprend ni dispositions, ni instruments pour extraire et réinsérer les dizaines de milliers des mineur(e)s de tous âges qui sont et qui seront en situation d’exploitation au moment de l’entrée en vigueur de la loi, ce qui traduit l’absence de vision et la précipitation qui a prévalu dans le processus d’adoption du projet de loi par le Gouvernement et les deux chambres du Parlement pour des considérations politiciennes.
Alors que les deux décrets d’application de cette Loi avaient été finalisés par l’ancien Ministre de l’Emploi, en septembre 2016, ils n’ont été présenté au Conseil de Gouvernement par le nouveau que le 3 août 2017, soit une année presque jour pour jour :
1.    Décret N° 2.17.355 relatif au « modèle de contrats des travailleurs domestiques »
2.    Décret N° 2.17.356 relatif à « la liste complémentaire des travaux dangereux interdits aux travailleur(e)s de 16 et 18 ans »
S’il en était besoin, le retard d’une année pris pour la présentation, sans changement, de deux textes finalisés en septembre 2016[i] ne manque pas d’inquiéter sur la suite du processus, dont voici le processus daté que j’ai vécu, directement et indirectement, de l’intérieur avec beaucoup d’autres acteur(e)s.
Loi 9.12 : A l’origine, était le Code du travail
Après des négociations qui auront duré près de 20 ans, le Code de travail a été promulgué,
le 11 septembre 2003 et publié dans le Bulletin Officiel, le 6 mai 2004, avec une réserve en son article 4 qui stipule « Les conditions d'emploi et de travail des employés de maison qui sont liés au maître de maison par une relation de travail sont fixées par une loi spéciale[ii] ». Cela s’était passé pendant le mandat du
1er Gouvernement Jettou qui s’était achevé en juin 2004.
Durant le mandat du 2ème Gouvernement Jettou, personne ne s’était occupé de combler ce vide juridique.
Il faut dire qu’en ces temps-là, la régularisation de la situation de ce qu’il était convenu d’appeler « personnel de maison » n’intéressait personne, en dehors de certaines associations de la société civile. Car, il faut rappeler que, dès 2001, la société civile lançait des programmes de sensibilisation et de plaidoyer pour la scolarisation des petites rurales, en application de la loi sur la « scolarisation obligatoire », en dénonçant leur « mariage précoce[iii] » et leur « exploitation dans le travail domestique[iv] ».
en 2005, l’Association « Institution Nationale de Solidarité Avec les Femmes en détresse (INSAF) » lancera le programme « Lutte Contre le Travail des Enfants (LCTE) », principalement, dans la région de Chichaoua
et en d’autres localités (Youssoufia, Bir Jdid). Il s’agissait de repérer, dans les localités rurales pourvoyeuses, les « fillettes » en exploitation en ville et de convenir avec leurs parents les conditions de leur retrait et de leur réinsertion en famille et à l’école et assurer le suivi pédagogique et social, après.
En contrepartie, l’association versait aux parents une « modique » subvention mensuelle. Le succès est tel que dans plusieurs localités où INSAF était intervenue, plus personnes ne « louait » sa fille. Elle aura ainsi démontré, à l’échelle d’une province pauvre qu’il était possible d’éradiquer cette pratique indigne et que tous les parents accusés de tous les maux tenaient à leurs filles[v]. Plus tard, INSAF élargira ce programme à d’autres localités, malgré ses faibles ressources, mais toujours sans l’implication structurée et pérennisée des départements ministériels, ni des collectivités locales concernés.
Du côté du Gouvernement, il aura fallu attendre 2007 pour que le  Ministère (USFP) de l’Emploi et de la Formation Professionnelle dans le Gouvernement Abbas El Fassi, en provenance du Secrétariat d’Etat chargé de la Famille et de l’Enfance, pour que le chantier des « travailleur(e)s de maison » soit réactivé. Cependant, la réflexion de son équipe était axée sur les « travailleur(e)s domestiques » adultes pour répondre aux dispositions de l’article 4 du Code du Travail.
Le projet de texte qu’il a élaboré reconduit pour les enfants les dispositions du code du travail, soit l’interdiction  aux moins de 15 ans et les procédures de contrôle appliquées au travail en « milieu ouvert », alors que l’exploitation dans le travail domestique a lieu à « huis clos ».
Sauf que dans le même Gouvernement, la Ministre (PPS) du Développement Social, de la Famille et de la Solidarité (et de l’enfant, même si ce n’est pas dans le titre), qui était en relation plus directe avec les associations de défense des Droits Humains concernant son département, avait une autre approche. Elle était convaincue de la nécessité d’une loi spécifique contre « l‘exploitation des enfants dans le travail domestique », en attendant une loi-cadre sur la protection de l’enfant, dans l’esprit du programme (PANE 2006-2016) « Un Maroc digne de ses enfants ! »[vi]
En coordination avec le Collectif associatif « Pour l’éradication de l’exploitation des mineur(e)s dans le travail domestique », constitué en mars 2009, elle a proposé un texte en 7 articles qui criminalise cette pratique indigne et prévoit des sanctions pécuniaires et des peines d’emprisonnement pour toutes les parties prenantes participant, directement ou indirectement, à l’exploitation des mineur(e)s : employeur(e), intermédiaire, parent et témoin passif.
En 2010, à la réception des deux textes, le Secrétariat Général du Gouvernement, dont chacun sait le pouvoir sur la production législative du Gouvernement, aurait émis des réserves sur l’opportunité d’une loi spécifique sur les « petites bonnes », d’une part, et demandé que le cas des mineur(e)s soit inclus dans le projet du Ministère de l’Emploi, sans le déséquilibrer, d’autre part[vii].
Loi 19.12 : L’âge minimal, 18 ans au lieu de 15
A ce stade, il est important de signaler que la référence commune à toutes les approches concernant l’âge minimal d’accès au travail domestique était « l’âge de scolarisation obligatoire », soit 15 ans, qui correspond à une interprétation restrictive de la Convention 138 de l’OIT[viii] qui datait déjà de 1973. Pourtant, la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) de 1983[ix] et, surtout, la Convention 182 de l’OIT[x] de 1999 qui traite des « pires formes de travail des enfants » offraient des pistes de réflexion bien plus favorables.
Par ailleurs, en 2001, le Ministère de la Prévision Economique et du Plan avec le soutien de l’UNICEF et
le FNUAP réalise la première étude sur les « filles-domestiques » dans le périmètre de la Wilaya de Casablanca. Elle concernait bien les moins de 18 ans[xi] en référence à la CIDE qui stipule en son article 1 : « Au sens de la présente convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt, en vertu de la législation qui lui est applicable ».
EN 2009, le Collectif associatif réalise, la première étude nationale sur les « petites bonnes » âgées de 15 et moins. Malgré la difficulté de réaliser ce type d’étude, s’agissant « d’exploitation à huis clos », elle a confirmé la révoltante situation de ces dizaines de milliers d’enfants en âge et en conditions de vie[xii] :
·       Données sur les « petites bonnes » :
o   30%  n’ont jamais été scolarisées
o   49% sont en abandon scolaire
o   38% sont âgées de 8 à 12 ans (âge du premier cycle de l’enseignement fondamental)
o   62% sont âgées de 13 à 15 ans (âge du second cycle de l’enseignement fondamental)
o   21% sont encore scolarisées et travaillent par intermittence (vacances scolaires)
·       Données sur les familles émettrices :
o   47% sont pauvres
o   28% sont très pauvres
o   16% sont sans revenus réguliers
o   9% ont des revenus réguliers
o   94% des mères et 72% des pères sont analphabètes
·       Données sur les familles récipiendaires :
o   54% sont dans la catégorie dite « classe moyenne »
o   20% sont dans la catégorie dite « classe aisée »
o   53% des mères et 68% des pères ont suivi des études supérieures
·       Conditions de vie :
o   Protection familiale : Filles soustraites de leur milieu social et privées de l’affection familiale directe ;
o   Education : Contraintes d’interrompre leur scolarité et d’abandonner leurs rêves et aspirations ;
o   Protection contre le travail précoce : Subissent l’exploitation économique et leur enfance est dérobée ;
o   Santé : Tâches ménagères effectuées affectent leur développement et leur croissance ;
o   Protection contre la violence et la maltraitance : Victimes d’exploitation sexuelle et de violences physiques et psychologiques.
Pendant ce temps, dans la vraie vie, ON TORTURE
Le 21 Juillet 2010, Fatima, mineure, s’est enfuie de la maison de ses employeurs qui la maltraitaient au quartier Derb Chorfa (Casablanca). Trouvée  par la police judiciaire dans un état physique et psychologique alarmant, l’enfant est conduite à l’Hôpital Baouafi où le médecin constate l’extrême gravité de son état.
A défaut de centres dédiés à l’accueil d’enfants dans cette situation, la PJ a confié la fillette au Samusocial puis au Centre Abdeslam Bennani sur ordre du Procureur, sachant que ces deux centres, qui accueillent des enfants en situation difficile, n’offrent pas de services correspondant aux besoins de Fatima[xiii].
Pendant ce temps, son employeuse,  Sabah K., a disparu le temps que ses proches trouvent le père à Imintanout et obtiennent son désistement de toute poursuite écrit et légalisé, à Casablanca le 23 juillet 2010 (!).
Le Procureur du Roi auprès du TPI de Casablanca l’a poursuivie en flagrant délit pénal et ordonné son emprisonnement. Le procès s’est déroulé en ­6 audiences. Le verdict rendu le 30 Août 2010, condamne l’accusé à 1 an de prison ferme et 500Dh d’amende. 1Dh symbolique est accordé à la partie civile, dont les associations INSAF et Bayti.
Du côté du Gouvernement, pour trouver « rapidement » un compromis entre les 2 textes des ministères de « l’Emploi » et du « Développement Social », une commission a été formée avec la consigne de « ne pas  déséquilibrer le texte du ministère de l’Emploi », mais sans aucune orientation sur les mineur(e)s concernant les prestations d’accompagnement[xiv] pourtant communiquées par le Collectif associatif dans un mémorandum de plaidoyer très largement diffusé : identification, signalement, extraction, accueil, protection, réhabilitation physique et morale, réinsertion en famille et à l’école, suivi pédagogique et social.
La proposition de Loi du Ministère du Développement Social est enterrée.
Dans le même temps, après une série de rapports et d’études, le 16 juin 2011, la Conférence Internationale du Travail de l’OIT adopte la Convention 189[xv] sur « le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques », ce qui change la donne en matière d’exigence sur l’âge minimal d’accès au travail domestique et autres dispositions pour les personnes adultes.
Par ailleurs, la nouvelle Constitution ratifiée le 29 juillet 2011[xvi] a apporté d’importantes dispositions en matière de Droits de l’Enfant qui rendent caduques celles proposés par le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle concernant les mineur(e)s en exploitation dans le travail domestique.
C’est ainsi qu’en 2011, le Collectif associatif « Pour l’éradication de l’exploitation des mineur(e)s dans le travail domestique » a inscrit dans son mémorandum de plaidoyer « l’âge minimal de 18 ans ».
Loi 19.12 : Début d’un long et lent processus législatif
Pendant ce temps, dans la vraie vie, ON TUE :
Khadija A. est morte, le 26 juillet 2011 à El Jadida, à la suite de sévices exercés sur elle par son employeuse.
Agée de 11 ans, elle était employée à Casablanca pour 400 DH par mois, depuis plus de trois mois, après l’avoir été à Marrakech. Elle est originaire d’un douar enclavé, à 200 km de Marrakech, sur la route d’Agadir.
Son employeuse à Casablanca l’a « prêtée » à sa fille et son beau-frère pour leurs vacances à El Jadida. Une semaine après, Khadija est trouvée morte dans la maison, le corps entièrement couvert de traces de coups.
La femme Amina L., 31 ans, sans enfants, est incarcérée et poursuivie pour coups et blessures ayant donné la mort. Le mari Lahbib M., 41 ans, laissé en liberté est poursuivi pour non-assistance à personne en danger ; décision qui a fait l’objet d’appel du Procureur Général de la Chambre criminelle.
Le père de la victime a abandonné toute poursuite contre les auteurs de la mort de sa fille (!)
La société civile très mobilisée fait pression pour que justice soit rendue. INSAF et Bayti, reconnues d’utilité publique, se sont constituée partie civile.
La femme reconnue coupable est condamné à 10 ans de prison.
Le 12 octobre 2011, soit dans les derniers jours du Gouvernement Abbas El Fassi, le Ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle présente un Projet de loi qui répond à l’objectif fixé concernant les adultes, mais qui ignore la situation des mineur(e)s. Ce texte n’a pas été retenu.
Serait-ce la pression de la société civile en plein mouvement dit du « 20 février », la résistance de ministres plus sensibles à la cause des enfants ou les deux à la fois. Nous ne le saurons jamais. Toujours est-il que la question était laissée au Gouvernement suivant, qui sera nommé, le 3 janvier 2012.
Pendant ce temps, dans la vraie vie, ON POUSSE AU SUICIDE :
Le 10 janvier 2013 à 11h30, Nassima N., « domestique » dans une famille de médecin au Quartier Bourgogne
à Casablanca, s’est jetée de la terrasse de ses employeurs pour mettre fin, nous dira-t-elle, à sa vie de femme physiquement exploitée et psychiquement martyrisée.
Le jeune du quartier qui a tenté de la rattraper en bas de l’immeuble est décédé des suites du choc avec le corps de Nassima. Nous nous inclinons devant son acte spontané de citoyenneté et d’abnégation.
Pendant ce temps, dans la vraie vie, ON CONTINUE A TUER :
Une enfant, Fadma, âgée de moins de 14 ans, exploitée comme domestique, est décédée, le 24 Mars 2013
à l’hôpital Hassan II en Agadir (Maroc) des suites d’actes de violence caractérisée. Son employeuse est mise en détention. Le mari, gendarme de son état, ne l’est pas.
De famille nombreuse originaire d’une zone enclavée à 160 km sur la route de Taroudannt, Fadma est l’un des soutiens de sa famille, malgré son très jeune âge.
24 associations sont mobilisées, dont 2 (INSAF et Bayti) se sont constituées partie civile.
La femme a été condamnée à 20 ans de prison.
En mars 2013, un groupe de député(e)s du Parti Authenticité & Modernité (PAM) dépose une Proposition de Loi intitulée « FATEM » à la mémoire de Fadma tuée en Agadir, le même mois, qui fixe l’âge minimal à 18 ans, entre autres dispositions. Elle ne sera présentée en plénière que le 18 décembre 2014 et restera sans suite depuis !!
En mars 2013, à l’écart du Ministère de l’Emploi, la Ministre (PJD) de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement Social lance le processus d’élaboration de la Politique Publique Intégrée de Protection de l’Enfant au Maroc (PPIPEM) qui « ambitionne d’introduire la dimension de la protection de l’enfance dans les différentes politiques publiques et les programmes sectoriels aux niveaux central et local, et de créer des dispositifs locaux intégrés de protection de l’enfance, accessibles pour les enfants, en leur favorisant une protection efficace et durable contre toutes les formes de négligence, d’abus, de violence et d’exploitation[xvii] ». Plus de quatre années après, il n’en sortira rien de concret !!
Le 3 mai 2013, soit dix-sept mois après sa nomination, le nouveau Ministre (PPS) de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, sans rien changer concernant les mineur(e)s, fait passer au Conseil de Gouvernement le projet de Loi 19.12 concernant « Les conditions d’emploi et de travail des travailleur(e)s domestiques » et l’envoie à la Chambre des Conseillers du Parlement. Ce sera sa dernière action, avant d’être remplacé, en octobre, par un autre ministre (PPS), dans le cadre du remaniement du gouvernement suite à la sortie fracassante du parti de l’Istiqlal.
Loi 19.12 : Des avis compétents et autorisés unanimes pour 18 ans
La 23 septembre 2013, le Président de la Chambre des Conseiller(e)s envoie le projet de Loi 19.12,
pour avis aux Conseil Economique, Social & Environnemental (CESE) et Conseil National des Droits Humains et (CNDH).
A la suite du remaniement du Gouvernement intervenu, le 10 octobre 2013, un nouveau Ministre (PPS) de l’Emploi et des Affaires Sociales (sans la Formation Professionnelle) est nommé et portera le projet jusqu’au vote final par le Parlement.
Le 31 octobre 2013, la Chambre des Conseillers et l’UNICEF organisent une Journée sur le thème « Equité et droits de l’enfant : Quel rôle pour le législateur ? » dont une très large partie a été consacrée aux aspects liés à « l’exploitation des mineures dans le travail domestique » et dont les conclusions ont confirmé l’unanimité sur l’âge de 18 ans.
En novembre 2013, après avoir étudié le Projet de Loi 19.12 et auditionné des parties prenantes, dont des membres concernés de la société civile, les réponses motivées et amplement documentées du CESE[xviii]
et du CNDH[xix], deux institutions constitutionnelles compétentes, sont sans appel : L’âge minimal d’accès au travail domestique doit être fixé à 18 ans.
Le 17 septembre 2014, le Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU, qui a auditionné le Gouvernement de notre pays, à Genève, dans le cadre de l’examen des « Conditions d’application de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant » par le Maroc, a recommandé la fixation de l’âge minimal d’accès au travail domestique doit être fixé à 18 ans[xx].
Le 27 novembre 2014, le message royal adressé aux participants au 2ème Forum Mondial des Droits
de l'Homme à Marrakech mentionne « Une loi sur le travail domestique qui concerne principalement
les jeunes filles est actuellement en discussion au Parlement »[xxi]
, ce qui a été interprété comme un encouragement à aller de l’avant dans le respect de leurs droits.
Loi 19.12 : Trois ans au Parlement
Chambre des Conseiller(e)s : Première lecture
Juin 2013 : Réception du Projet de Loi 19.12 par La Chambre des Conseiller(e)s
23 juin 2014 : Présentation du projet par le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales
devant la « Commission de l’éducation, des affaires culturelles et sociales »
6 janvier 2015 : Vote du projet par la Commission (6 pour et une abstention)
27 janvier 2015 : Vote du projet par les Conseiller(e)s en plénière (14 pour et 12 abstentions)
·      Chambre des représentant(e)s : Première lecture
28 janvier 2015 : Réception du Projet de Loi 19.12 par La Chambre des Représentant(e)s
9 février 2015: Présentation du projet par le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales
devant la « Commission des secteurs sociaux »
9 mai 2016 : Vote du projet par la Commission (9 pour et 2 contre)
31 mai 2016 : Vote du projet par les Représentant(e)s en plénière (41 pour et 17 contre)
·      Chambre des Conseiller(e)s : Deuxième lecture
15 juin 2016 : Présentation du projet par le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales
devant la « Commission de l’éducation, des affaires culturelles et sociales »
25 juillet 2016 : Amendements contre l’avis du ministre
et vote du projet remanié par la Commission (unanimité)
26 juillet 2016 : Vote du projet par les Conseiller(e)s en plénière (27 pour et 23 contre)
·         La chambre des Conseiller(e)s : 19 mois et demi pour un premier vote
A la suite de ces avis et de la large campagne médiatique et sur le terrain organisée par le Collectif « Pour l’éradication de l’exploitation des mineur(e)s dans le travail domestique » avec l’aide et le soutien
de plusieurs acteurs associatifs et institutionnels, tout laissait croire à une saine réaction de la Chambre des Conseiller(e)s et du Gouvernement.
Le 23 juin 2014, le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales présente le projet de Loi 19.12 devant
la « Commission de l’éducation, des affaires culturelles et sociales » de la chambre des Conseiller(e)s sans changement par rapport au texte transmis près de 7 mois auparavant.
Le maintien de l’âge de 15 ans dans le Projet de loi, ressenti par la société civile comme un reniement des engagements faits en diverses occasions, a été suivi d’une forte campagne de mobilisation.
Après moult tractations, le Ministre de l’Emploi propose de porter l’âge minimal à 16 ans au lieu de 15. Cette disposition a été présentée comme « un compromis qui tient compte de l’état des opinions dans le pays et dans la majorité parlementaire !! », alors que les témoignages recueillis et les comportements observés sur le terrain montrent le contraire !!
Le 6 janvier 2015, malgré toutes les assurances de la majorité comme de l’opposition, la « Commission
de l’enseignement, des affaires culturelles et sociales » de la Chambre des Conseiller(e)s vote le texte ainsi modifié par 6 voix pour et une abstention. Il faut noter, cependant, que l’article 6 modifié a été voté par 7 voix pour et 2 contre, alors que la Commission compte 16 membres !!
Le 7 JANVIER 2015, la représentante de l’UNICEF au Maroc adresse une lettre au Chef du Gouvernement pour rappeler les engagements internationaux du Maroc et l’incompatibilité des dispositions du projet de Loi avec, en particulier, la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) et les conventions de l’OIT ratifiées par notre pays.
Le 27 janvier 2015, soit 19 mois et demi après réception du Projet de Loi 19.12, la Chambre des Conseiller(e)s va le voter, en plénière à une heure tardive en présence d’une très faible assistance, tel qu’il a été transmis par la « Commission de l’enseignement, des affaires culturelles et sociales » par 14 voix pour et 12 abstentions, soit une participation de 21,67% !!
Les représentant(e)s de la société civile présent(e)s à la Chambre, ce soir-là, en sont sorti(e)s convaincu(e)s que tout restait encore à (re)faire. Il s’en suivra une campagne soutenue du Collectif associatif et une forte mobilisation de tous les acteurs concernés par la défense des Droits Humains et par le Droits de la Femme et de l’Enfant, en particulier.
·         La chambre des Représentant(e)s : 18 ans sous hypothèque
Le 28 janvier 2015, la Chambre des Représentant(e)s reçoit le Projet de loi 19.12.
Le 8 FEVRIER 2015, le CNDH adresse une lettre à tous les groupes parlementaires de la Première Chambre pour rappeler son avis suite à la saisine par la Chambre des Conseiller(e)s et la référence aux conventions de l’OIT concernant le travail des enfants.
Le 9 février 2015, le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales présente le projet de Loi 19.12 devant la « Commission des secteurs sociaux » tel qu’il a été voté par la Chambre des Conseiller(e)s et laisse entendre, en aparté, sa disposition à rechercher une solution à « l’âge minimal »
Le 11 février 2015, le Groupe du Progrès Démocratique (PPS) à la Chambre des Représentants, organise
à la Chambre, une journée de réflexion sur le thème « Travailleur(e)s domestiques et perspectives juridiques ». Le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales et, par ailleurs, membre du Bureau Politique du Parti y a participé aux côtés de très nombreux(ses) député(e)s et des représentant(e)s de la société civile, dont le Collectif associatif « Pour l’éradication de l’exploitation des mineures dans le travail domestique ». L’avis des participant(e)s était unanime et sans nuance : « L’âge minimal d’accès au travail domestique doit être fixé à 18 ans ». Une annonce avant-coureur des difficultés qui attendaient le Ministre pour la suite du processus législatif, sa déclaration sur la nécessité d’avancer sans brusquer l’opinion n’ayant pas convaincu.
Le 26 FEVRIER 2015, le CNDH adresse une lettre au Président de la Chambre des Représentant(e)s rappelant les engagements de notre pays et les dispositions de la Constitution sur les Droits de l’enfant.
Les interventions argumentées et pressantes, officielles et officieuses auprès de la Présidence de la Chambre des Représentant(e)s et des membres du Gouvernement, qui ont suivi le vote de la 2ème Chambre ont fini par avoir un impact sur la majorité parlementaire, même si cette campagne est suivie d’une très longue période de « silence », malgré le maintien de la campagne de plaidoyer de la société civile.
Le 3 juin 2015, une Commission Ministérielle de suivi présidée par le Chef du Gouvernement valide le projet « Politique Publique Intégrée de la Protection de l’Enfant au Maroc (PPIPEM)[xxii]». En page 9 du document diffusé par le Ministère de la Solidarité (MSFFDS) le projet de Loi 19.12 est cité comme un acquis, alors qu’il était en discussion !! Les propositions du Collectif associatif présentées en audition et en ateliers, lors de la préparation du projet, ne sont pas traitées et les indications sur l’exploitation des enfants dans le travail domestique y sont citées de manière générique. Il s’est confirmé, par ailleurs, qu’aucune coordination n’a été faite avec le Ministère de l’Emploi porteur dudit Projet de Loi.
Six mois plus tard, le 31 janvier 2016, à l’annonce d’une réunion de la « Commission des Secteurs Sociaux », le Collectif adresse une lettre ouverte aux chefs des partis de la majorité parlementaire pour attirer leur attention sur leur responsabilité morale et politique vis-à-vis des dizaines de milliers de mineur(e)s exploité(e)s dans le travail domestique et dans la protection de l’enfant, sur la base des engagements internationaux de notre pays et de la Constitution.
Le 29 février 2016, la Directeur Général de l’OIT, en visite officielle au Maroc où il participe au  « Forum international sur les politiques de l’emploi », reçoit le Collectif associatif qui lui remet son mémorandum de plaidoyer.
Et ce n’est que le 9 mai 2016, soit 3 mois après sa présentation par le Ministre, que la « Commission
des secteurs sociaux » de la Chambre des Représentant(e)s vote la Loi 19.12 par 9 voix pour et 2 contre, dans une ambiance tendue.
Car, à défaut de débat[xxiii] et de recherche de propositions équitables pour les populations concernées,
le processus législatif, qui coïncidait avec la fin de la mandature, prenait une tournure plus politicienne qui a vu se mobiliser, comme jamais, tous les chefs de partis de la majorité.
Pris en tenaille entre ses alliés qui sont contre, en particulier, la Parti Justice et Développement, qui dirige le Gouvernement, et le Mouvement Populaire, d’un côté, et les députées qui sont contre, dont plusieurs
du groupe de son propre parti politique, et ceux de l’opposition, le Ministre de l’Emploi et des Affaires Sociales, avec l’implication personnelle du Secrétaire Général du parti et membre du Gouvernement, proposera à la Commission une formule qui fixe l’âge minimal à 18 ans, mais qui l’hypothèque par deux mesures renvoyant la mise en œuvre à plusieurs années plus tard :
1.    Entrée en vigueur de la Loi, une année après publication des décrets d’application dans le BO
2.    Période transitoire de 5 ans, après entrée en vigueur, au cours de laquelle les 16-18 ans peuvent être exploité(e)s sous conditions.
Le 31 mai 2016, dans une ambiance très tendue, les partis de la majorité ont fait bloc avec le Ministre de l’Emploi pour faire passer le texte avec 40 voix pour et 17 contre.
La déception, voire l’indignation, est grande dans l’opinion et dans la société civile exprimée à travers les médias qui ont organisé plusieurs émissions en radios et en télévision et dans des communiqués de presse.
Le Projet ainsi voté est transmis à la Chambre des Conseiller(e)s en deuxième lecture.
·         La seconde lecture des Conseiller(e)s : confrontation politique
Le 13 JUIN 2016, le CNDH adresse une lettre au Président de la Chambre des Conseiller(e)s soulignant les contradictions des dispositions du projet de loi avec celles des engagements de notre pays et relevant celles qui doivent être réaménagées (répression contre les contrevenants) ou supprimées (période de transition).
Le 14 JUIN 2016, l’UNICEF adresse une lettre au Président de la Chambre des Conseiller(e)s soulignant les efforts entrepris par notre pays en matière de Droits de l’Enfant réitérant sa position sur les dispositions concernant les enfants dans le Projet de Loi 19.12 au regard des engagements.
Le 15 juin 2016, l’ONU Femmes (entité des Nations unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes) adresse une lettre au Président de la Chambre des Conseiller(e)s attirant son attention sur l’impact de l’exploitation dans le travail domestique des filles en termes de privation de droits et de discrimination[xxiv].
Le 15 juin 2016, le Ministre de l’Emploi revient devant la « Commission de l’éducation et affaires culturelles & sociales »  de la Chambre des Conseiller(e)s pour présenter le Projet de Loi 19.12 voté par la Chambre des Représentant(e)s, dans une ambiance de forte mobilisation qui ne lui est forcément favorable.
Contrairement au premier passage de la Loi devant la Deuxième Chambre, cette fois les membres de la Commission ont maintenu leurs exigences de modifier les articles contraires aux intérêts de l’enfant, en particulier, la période de transition de 5 ans.
Le 25 juillet 2016, malgré l’opposition du Ministre les membres de la Commission ont voté, à l’unanimité, les principaux amendements revendiqués par la société civile et recommandés par les acteurs institutionnels.
Le 26 juillet 2016, l’ambiance à la plénière de Chambre était électrique.
Plusieurs élu(e)s avaient exprimé clairement leur volonté de ne pas revenir sur les amendements votés par la « Commission de l’éducation et affaires culturelles & sociales » comme demandé par le Ministre de l’Emploi. Et, devant le risque de plus en plus évident de vote favorable, les chefs de partis de la majorité,
en séance comme au téléphone, avaient « (re)pris la main[xxv] ». Le Secrétaire Général du PPS, déjà fortement impliqué, remplace le Ministre de l’Emploi, en mission à l’étranger !! Il monte au créneau en plénière pour défendre avec véhémence l’utilité du texte en discussion pour les milliers de travailleur(e)s domestiques et confirmer que le compromis élaboré concernant les mineur(e)s est réaliste et constitue un progrès !!
Plusieurs député(e)s pas convaincu(e)s et craignant la confrontation avec leur secrétaires généraux de parti et les chefs de groupe parlementaire, ont préféré quitter l’hémicycle !!
Dans ces conditions, la Chambre des Conseiller(e)s a voté, en deuxième lecture par 27 voix pour et
23 contre[xxvi]
, la Loi 19.12 relative aux « Conditions d’emploi et de travail des travailleur(e)s domestiques ».
En attendant de reprendre le combat pour mettre fin à une pratique sociale indigne et contraire aux engagements de notre pays et à notre constitution, le Collectif associatif « Pour l’éradication de l’exploitation des mineur(e)s dans le travail domestiques » a publié un communiqué qui exprime toute la déception et toute la frustration ressenties et la colère retenue contre ce texte raté :
"L’Histoire retiendra que 23 ans après la ratification par notre pays de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, il s’est trouvé un gouvernement et des élu(e)s qui n’ont pas osé transcender les oppositions rétrogrades et libérer les mineur(e)s du travail domestique[xxvii]"
Loi 19.12 : Le nouveau Gouvernement a autre chose à faire
·         Loi 19.12 : Programmes électoraux pour les législatives du 7 octobre 2017
Début septembre 2016, le Collectif associatif interpelle par écrit et rencontre les représentants de la majorité des partis politiques participant aux élections législatives pour attirer leur attention sur la nécessaire modification de la Loi 19.12 pour en faire un texte de protection et de réhabilitation des « petites bonnes ».
Trois partis ont traduit ces revendications dans leur programme électoral, dont le PPS et l’USFP membres de l’actuel Gouvernement :
·      Le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) : Page 11/27 (français)
« Mettre à profit le délai de transition, prévu par la loi, de porter l’âge minimum du travail domestique à 18 ans pour mettre en place un plan de réinsertion des travailleurs mineurs et surtout les jeunes filles de 16 à 17 ans, en étroite collaboration avec les associations de la société civile, afin de les réintégrer, à travers une formation spécifique adaptée et notamment le programme d’alphabétisation des jeunes déscolarisés, dans le système d’éducation et de formation professionnelle. Le PPS s’engage par ailleurs à prendre les initiatives, sur les plans politique et juridique, pour réduire au maximum, voire supprimer ce délai de transition »
·      L’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP) : Page 134/225 (traduit de l’arabe)
« Prendre des dispositions préventives et incitatives pour interdire le travail des enfants de moins de 18 ans et leur exploitation et renforcer et coordonner les actions sur le terrain pour réprimer les contrevenant(e)s »
·      La fédération de la gauche Démocratique (FGD) : Page 33/61 (traduit de l’arabe)
-      « Application immédiate de l’âge minimal de 18 ans ;
-      Interdire l’exploitation de tout(e) mineur(e) à partir de cette mise en application ;
-      Mettre en œuvre un plan d’action efficace pour régulariser les situations des dizaines de milliers de personnes mineures en situation d’exploitation lors de cette mise en application ;
-      Mettre en œuvre un plan de sensibilisation et de conscientisation des Droits de l’Enfant et des dangers que représente le travail domestique pour lui »
·      Le Parti Justice & Développement (PJD) : Page 57/106 (traduit de l’arabe)
« Promulguer et mettre en œuvre le Projet de Loi sur le « Conseil consultatif de la famille et de l’enfance » et celui sur les « Conditions d’emploi et de travail des travailleur(e)s domestiques »
Lors de la rencontre avec le Collectif, ses représentants ont réitéré la position du Parti dans les deux chambres du parlement, lors du vote de la loi 19.12. Ils considèrent que la période de transition de 5 ans est tout juste nécessaire à la préparation des conditions d’application de l’interdiction aux moins de 18 ans.
·      Le Parti Authenticité & Modernité (PAM) : Nos 10 engagements en 28 pages (bilingue)
Ses représentant(e)s ont promis de faire des revendications du Collectif un axe de travail dans la partie consacrée à l’enfant et à la jeunesse pendant la campagne, son programme étant déjà écrit.
·      Le Rassemblement National des Indépendants (RNI) : Programme électoral en 24 pages (arabe)
Les enfants de 0-18 ans figurent avec les cibles, en page 23, sans propositions d’actions spécifiques.
·      Le Mouvement Populaire (MP) : Page 31/42 (traduit de l’arabe)
« Combattre l’emploi des filles de moins de 16 ans dans le travail domestique »
Dans l’émission consacrée par la chaîne de télévision nationale 2M à la réponse des chefs de partis aux question des représentant(e)s de la société civile, pendant la campagne électorale, Mhand Laenser, Secrétaire Général, a considéré que la revendication de l’âge de 18 ans est irréaliste, dans l’état actuel !!
·         Loi 19.12 : COMMENT FAIRE ?

Rappel des recommandations de l’OIT de mars 2002[xxviii] :

Pour favoriser l’élimination des pires formes de travail des enfants en une période de temps relativement courte « l’action doit s’appuyer sur la législation, dont l’objectif ultime reste l’éradication du travail des enfants, mais qui se fixe comme objectif prioritaire explicite d’identifier et de proscrire les pires formes de travail des enfants. Cette législation doit également prévoir des sanctions adéquates envers les auteurs d’infractions et une compensation adéquate pour les victimes; son application doit être rigoureuse et impartiale.

« Cependant, l’impact d’une telle législation, bien que cruciale, restera limité si elle ne s’accompagne de mesures pour :
-       Sensibiliser et mobiliser l’opinion publique afin qu’elle lutte contre les pires formes de travail des enfants;
-       Empêcher les enfants d’être entraînés sous des promesses fallacieuses dans les pires formes de travail des enfants;
-       Soustraire les enfants engagés dans les pires formes de travail des enfants;
-       Réadapter les enfants soustraits et les réintégrer dans le système scolaire;
-       Améliorer le système scolaire en multipliant le nombre d’écoles et d’enseignants et en l’adaptant mieux aux besoins locaux;
-       Fournir des subventions et des revenus aux enfants les plus touchés et à leurs Familles
« Pour répondre à ces exigences, il faut élaborer des programmes multidimensionnels assortis de délais, bénéficiant d’un soutien financier suffisant et d’un suivi rigoureux de leur mise en œuvre. Le problème ayant une dimension internationale, les efforts nationaux doivent être appuyés par une importante coopération internationale.

En avril 2017, à la veille de la présentation du Programme de Gouvernement devant le Parlement,
le Collectif associatif a adressé une lettre au Chef du Gouvernement désigné, ainsi qu’à tous les partis représentés au parlement pour demander la prise en charge du grave problème social de « L’exploitation des mineur(e)s dans le travail domestique », soit :
1.    Modifier les dispositions des articles 6 et 27 pour permettre d’appliquer immédiatement la limitation
à 18 ans de l’âge d’accès au travail domestique,
2.    Compléter l’article 6 de manière à interdire « le recrutement » de toute personne mineure nouvelle,
à partir de l’entrée en vigueur de cette disposition,
3.    Renforcer l’article 23 sur la dissuasion et la répression en distinguant le cas des mineur(e)s de celui des travailleur(e)s domestiques adultes et prévoir des sanctions contre les personnes morales intermédiaires,
4.    Engager un plan d’action interministériel efficace assorti d’un calendrier pour régulariser la situation des dizaines de milliers de mineur(e)s en situation d’exploitation au moment de l’entrée en vigueur de cette disposition, et de celles des enfants qui pourraient en être victime après,
5.    Engager un plan d’action multi-annuel de sensibilisation de la population et des acteurs sociaux sur les droits de l’enfant et sur les dangers du travail domestique.
6.    Doter les « travailleur(e)s sociaux » d’un statut leur permettant d’assurer les actions de repérage, d’information, de retrait des mineur(e)s et leur accompagnement jusqu’à réinsertion consolidée, en coordination avec les autorités et les services compétents.

IMPORTANT
Pendant tout le processus législatif, le sujet des « petites bonnes » a pris le pas sur les droits des travailleur(e)s domestiques qui sont les principaux concerné(e)s par la loi 19.12, à telle enseigne que médias comme interlocuteur(e)s l’appelaient « loi sur les petites bonnes ».
Il est, par conséquent, important que syndicats et société civile prennent en charge l’amélioration et l’accompagnement de la mise en œuvre de ce texte pour toutes les parties prenantes : travailleur(e)s, employeur(e)s, Inspection du travail et, voire, Justice.
A titre d’exemple, la couverture sociale, dont elles sont exclues par la Dahir portant loi n° 1-72-184 du 27 juillet 1972 relatif au régime de sécurité sociale doit être au centre des revendications.




[i] L’examen des 2 décrets était annoncé à l’ordre du jour du Conseil de Gouvernement du 30.09.2016 annulé en dernière minute. Il faut dire que la campagne des législatives d’octobre avait pris le pas sur toute autre activité !!
[v] Les études réalisées par différents acteurs ont montré la corrélation entre la pauvreté (Critères  INSAH) et que l’exploitation concerne quasi-exclusivement, les filles.
[vii] Les protagonistes de cette étape du processus sont resté(e)s muet(e)s sur les raisons du changement de cap.
[xi] Cf. « Enquête statistique sur les filles-domestiques âgées de moins de 18 ans dans la Wilaya de Casablanca »  - 2001
[xiii] Parmi les principales revendications du Collectif, la mise en place de structures d’accueil et de réhabilitation
[xiv] Plusieurs participant(e)s diront, plus tard, leur totale ignorance du sujet. Et pour cause !!
[xxiii] Des député(e)s de l’USFP ont quitté l’hémicycle pour protester contre la rigidité de la conduite des débats
[xxvi] 27 pour (PJD – RNI – MP – PPS –  PI - CGEM) 23 contre  (PAM – USFP – UMT – CDT) l’UC n’a pas participé.
[xxvii] Cf. communiqué de presse diffusé par le Collectif, le 29 juillet 2016
[xxviii] « Pour la mise en œuvre de la Convention 182 de l’OIT » Guide pratique destiné aux parlementaires - Conférence Interparlementaire et OIT – Marrakech - Mars 2002

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